Antigone – 1990

de Berthold Brecht | Mise en scène : François Emery

Un texte d’actualité
Décembre 1989, la Roumanie se libérait du joug d’un dictateur qui faisait passer ses démesurées ambitions personnelles avant la vie, le respect et les lois du cœur. Toute la thématique de la pièce de Sophocle, le drame d’Antigone qui, au prix de sa vie, va chercher à enterrer les restes de son frère tombé au combat transgressant en cela l’édit inique du tyran Créon, se retrouvait dans la lutte d’un peuple contemporain qui osait enfin prendre son destin en main.
B. Brecht, en 1948, à Coire, avait créé sur une traduction du « poète fou » Hölderlin un « Antigone – Modell ». La lecture de ce texte quelques années auparavant m’avait fasciné par son actualité. Je décidai donc de me lancer dans cette aventure dans la ligne des magnifiques mise en scènes de Philippe Grand.
Une aventure fabuleuse
Dans un décor de Béatrice Lipp qui recréait l’atmosphère des souterrains de béton des bunkers de la « Securitade roumaine », nos comédiens évoluaient en costumes contemporains, Guy Reyren campait un tyran intransigeant et mégalomane, Christine Emery, une Antigone dans toute sa dramatique et son humanité, Aline Stoudmann une Ismène intense, partagée entre l’envie de vivre et celle d’aider sa sœur, Philippe Châtelain un Tirésias profond et désabusé, sans oublier Anne-Michèle Dorthe qui en direct au piano s’accompagnait dans son rôle de Coryphée. Le chœur du peuple et des Anciens qui intervenait, dansait, mangeait et apostrophait son tyran comme la foule devant le palais de Ceaucescu à Bucarest.
Une aventure fabuleuse pour moi qui ai toujours cru qu’avec une bonne troupe d’amateurs, et dans un village comme le nôtre, il était possible de réaliser avec succès plusieurs sortes de théâtre, même si ce théâtre est parfois réservé à quelques salles « consacrées » à la création moderne.

Au théâtre du Jorat
La réussite de cette aventure s’est révélée dans le succès populaire que la troupe a rencontré et dans l’invitation reçue à venir jouer cette mise en scène sur la mythique scène du Théâtre du Jorat à Mézières dans le cadre de la Nuit de la St-Jean. Une apothéose qui avait d’ailleurs été mise en danger par les éléments déchaînés lorsque des trombes d’eaux s’étaient abattues sur le décor au moment de son transbordement de la grande salle du collège du Centre à la grange de Bel-Air où Frank Mayor avait accepté de nous laisser entreposer nos « souterrains » de carton-pâte.
Merci à la troupe, merci à son comité de m’avoir fait confiance à l’époque; j’ai toujours adoré sortir des sentiers battus et cette mise en scène fut un moment extraordinaire de richesse humaine, de joie et de fierté.

cddmPLAQ-0049cddmPLAQ-0047

Pour marque-pages : Permaliens.

Les commentaires sont fermés.